Sarajevo, mémoire de guerres – Pauline Delassus, Paris Match

Sarajevo, mémoire de guerres

Paris Match | Publié le 04/07/2016 à 23h39 | Mis à jour le 04/07/2016 à 23h42
Pauline Delassus

Le festival WARM confirme son succès après une semaine de conférences, de projections et d’expositions sur les conflits contemporains.

La guerre ne s’oublie pas à Sarajevo, on la voit partout, sur les façades abîmées de Sniper Alley, à travers les ruines colorées de l’ancien village olympique, dans les nombreux cimetières qui entachent le flanc des collines autour de la ville. Reste aussi une génération de reporters, parmi les plus grands, marqués par ce siège de quatre années où ils ont fait leurs premières armes et laissé leurs jeunes années. Vingt ans après, on les retrouve au café « Meeting Point », comptoir de ralliement des festivaliers, non loin des berges de la jolie rivière Miljacka qui traverse Sarajevo. Un verre à la main, ils refont le monde d’hier et surtout celui d’aujourd’hui, animés comme à leurs débuts par les conflits du moment, curieux de découvrir les films et les expositions sélectionnés par Rémy Ourdan, correspondant de guerre au Monde et réalisateur du film documentaire « Le siège – Sarajevo 1992-1995 » et par Maral Deghati, productrice et conservatrice, tous deux instigateurs et grands manitous de l’événement.

La mission du festival se détache en blanc sur son affiche bleu marine : « raconter l’histoire avec excellence et intégrité », sérieuse ambition proposée dans une ambiance décontractée. L’esprit chaleureux de WARM, poursuivi tard dans la nuit des bars sarajéviens, n’empêche pas les débats (les conférences « Le choc des images informe-t-il ? », « Les civils en guerre », « Les archives de guerre »), ni la force des images des expositions.

Celles sobres et émouvantes du photographe Enrico Dagnino, au plus près des lignes de fronts, exposées à la galerie Duplex 100m2, un lieu charmant créé dans un appartement du centre ville par le français Pierre Courtin. Celles encore du mexicain Bernandino Hernandez, venu pour la première fois en Europe présenter ses incroyables reportages, un feuilleton de la violence d’Acapulco dont les héros sont des corps sans vie. La semaine passe en petit comité, entre initiés et étudiants, étrangers pour la plupart : les photographes slovènes, iraniens et australiens Matej Leskovskek, Manoocher Deghati et Andrew Quilty, le réalisateur anglais Sean McAllister (venu présenter son film « Syrian Love Story », cinq années dans la vie d’un couple syrien), le journaliste français Jean Hatzfeld. Les bosniaques sont les grands absents, la guerre, même celles du bout du monde, est un souvenir trop frais, à leurs yeux dénuée d’intérêt. C’est pourtant chez eux, à Sarajevo, que Rémy Ourdan, par le biais de la fondation WARM, va ouvrir le WARM Center, une résidence pour journalistes, artistes et chercheurs, où seront développés des ateliers, un programme d’éducation et un système d’archives. Une bonne nouvelle, puisqu’il faudra revenir.

http://www.parismatch.com/Culture/Art/Sarajevo-memoire-de-guerres-1012084#8

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