Le Courrier des Balkans
Mise en ligne : vendredi 19 avril 2013
La fondation WARM et la mémoire des conflits contemporains
La fondation War, Art, Reporting, Memories ( WARM ) a été officiellement lancée le 8 avril dernier à Sarajevo. Elle se donne pour objectif de rassembler et de promouvoir les oeuvres des journalistes, écrivains et artistes qui travaillent sur les conflits contemporains. Rémy Ourdan, directeur adjoint du journal Le Monde et fondateur du collectif WARM revient sur l’origine et les buts de ce projet.
Propos recueillis par Laurent Geslin
Le Courrier des Balkans (CdB) : Comment est née la fondation WARM ?
Remy Ourdan (R.O.) : En avril 2012 et pour la première fois depuis 1995, des journalistes bosniens et étrangers qui avaient couvert la guerre en Bosnie se sont retrouvés à Sarajevo pour le 20e anniversaire du début du conflit. C’est durant ces rencontres qu’a germé cette idée un peu folle. Après la publication du livre Bosnia 1992-1995, qui rassemble le travail de plus de cinquante photographes et journalistes, beaucoup d’entre nous souhaitaient continuer à s’engager. Nous avons donc décidé de mettre en place le projet WARM, qui a pour but de rassembler au sein d’une fondation les travaux de tous les journalistes, de tous les artistes et de tous les écrivains de qualité qui travaillent sur les conflits contemporains et qui voudront bien s’engager avec nous. L’objectif est, à terme, de collecter la mémoire des conflits postérieurs à la guerre du Vietnam et de numériser ces archives.
La fondation WARM soutient déjà quelques projets comme le documentaire « Demain Tripoli » du photographe Florent Marcie ou la pièce de théâtre montée à Sarajevo par le metteur en scène Selma Spahić, d’après un livre de Karim Zaimović, un jeune écrivain mort durant le siège, en 1995. La fondation WARM organisera aussi chaque année en juin un festival à Sarajevo. Le financement de l’édition 2014 est déjà pratiquement bouclé.
CdB : La fondation WARM souhaite ouvrir d’ici quelques années un centre à Sarajevo…
R.O. : Sarajevo est pour nous un symbole de résistance et de survie, mais aussi d’espoir et de tolérance. L’ouverture d’un centre de ce type serait impossible à Jérusalem ou à Kigali. Sarajevo est une ville qui ne laisse personne insensible et c’est aussi un endroit où toute une génération de journalistes a passé quatre ans de sa vie. Durant le siège, nous avons partagé des moments extrêmement durs avec la population et contrairement à des guerres plus récentes comme l’Irak ou l’Afghanistan, nous vivions avec les citoyens de la ville. Beaucoup de journalistes présents l’année dernière pour le 20e anniversaire du début de la guerre n’étaient jamais revenus en Bosnie depuis 1995. Mais tous étaient profondément émus de retrouver ce pays et ses habitants.
CdB : Avez-vous reçu le soutien des autorités bosniennes ?
R.O. : Nous tenons absolument à rester indépendants de toute structure gouvernementale. C’est une condition essentielle pour être neutre et autonome. La municipalité de Sarajevo s’est cependant engagée, lors du lancement de la fondation WARM, le 8 avril dernier au théâtre SARTR de Sarajevo (Sarajevski ratni teatar), à nous aider à trouver un bâtiment pour accueillir le centre. Mais dans l’immédiat, nous souhaitons avant tout finir les projets que nous avons engagés, organiser le festival prévu en juin 2014 et, après Bosnia 1992-1995, éditer un second ouvrage qui couvrira l’ensemble des guerres balkaniques, de la fin des années 1980 au conflit de 2001 en Macédoine.
http://balkans.courriers.info/article22287.html